juillet - 2012


AUTEUR : ANNE-SOLÈNE GAY

Brève sur la liberté contractuelle des éditeurs à l’égard des distributeurs de chaînes audiovisuelles

Le 22 mai 2012, le CSA a rendu une décision de règlement de différend, publiée le 3 juillet 2012 au Journal officiel, mettant en exergue la liberté contractuelle de l’éditeur de la chaîne Equidia Live à l’égard de l’un des ses distributeurs, la société PARABOLE RÉUNION.

 

Le 7 octobre 2011, la société PARABOLE RÉUNION a saisi le CSA d’une demande de règlement de différend en raison d’un litige l’opposant à la société EQUIDIA et au GIE PMU. Le différend portait sur le non renouvellement du contrat de distribution de la chaîne Equidia Live, initialement conclu le 22 novembre 2001.

Les faits de l’espèce

Dans le courant de l’année 2011, le contrat de distribution conclu entre la société PARABOLE RÉUNION et la société EQUIDIA avait pris fin et cette dernière avait refusé de renouveler son offre commerciale. La société PARABOLE RÉUNION a donc demandé au CSA qu’il enjoigne à la société EQUIDIA de lui adresser une proposition commerciale de distribution de la chaîne Equidia Live présentant un caractère objectif et non discriminatoire.

Cette requête reposait essentiellement sur le fait que la chaîne Equidia Live se trouvait être diffusée par tous les opérateurs de télévision, notamment sur le territoire de La Réunion, créant ainsi une différenciation au détriment de la société PARABOLE RÉUNION, seul diffuseur mis à l’écart.

La société EQUIDIA invoquait sa liberté contractuelle et indiquait ne pas avoir souhaité renouveler son offre commerciale en raison d’une violation par la société PARABOLE RÉUNION des droits exclusifs de diffusion accordés à une société mauricienne. En outre, à la date à laquelle le contrat initialement conclu entre les deux sociétés était arrivé à son terme, la société EQUIDIA avait concédé les droits de commercialisation et de distribution par satellite de la chaîne Equidia Live à titre exclusif à la société CANAL+ RÉUNION.

A ce titre, la société PARABOLE RÉUNION a donc manifesté son désaccord auprès du CSA arguant du fait que la distribution exclusive de la chaîne Equidia Live par la société CANAL+ RÉUNION serait constitutive d’une entente anticoncurrentielle sur le marché de la télévision à péage. En effet, la chaîne Equidia Live, en tant que chaîne thématique bénéficiant d’un monopole absolu sur son marché, serait essentielle à la composition d’un bouquet attractif. Ainsi, selon la société PARABOLE RÉUNION, le fait de ne plus pouvoir proposer un tel programme dans son offre était de nature à la pénaliser sur le plan commercial.

Pour la société EQUIDIA, il n’existait aucun marché de chaînes thématiques consacrées au monde du cheval. Dès lors, la chaîne Equidia Live ne pouvait être en position de monopole absolu sur un marché inexistant. D’ailleurs, la chaîne Equidia Live enregistre une audience relativement faible, ce qui ne pourrait faire d’elle une facilité essentielle pour l’ensemble des distributeurs de chaînes de télévision.


La décision du Conseil supérieur de l’audiovisuel

Par sa décision en date du 22 mai 2012, le CSA a rejeté l’intégralité des demandes formulées par la société PARABOLE RÉUNION pour les motifs suivants :

-    premièrement, le CSA a affirmé sa compétence, au titre de l’article 17-1 de la loi du 30 septembre 1986, pour connaître d’un différend entre un éditeur et un distributeur concernant les conditions d’une proposition commerciale de distribution ;
-    deuxièmement, le CSA a écarté le moyen selon lequel la société EQUIDIA aurait rompu les relations contractuelles antérieurement entretenues avec la société PARABOLE RÉUNION de manière discriminatoire et sous le couvert de la mauvaise foi ;
-    troisièmement, le CSA a reconnu que l’exclusivité liant la société CANAL+ RÉUNION et la chaîne Equidia Live constituait un avantage objectif justifiant la rupture de la relation contractuelle. Néanmoins, le CSA a rejeté l’idée d’un préjudice de nature à déstabiliser la société PARABOLE RÉUNION en raison de cette exclusion contractuelle ;
-    quatrièmement, le CSA a estimé ne pas être compétent pour connaître des pratiques anticoncurrentielles ;
-    cinquièmement et dernièrement, le CSA a considéré que le refus de renouvellement du contrat ne portait en aucun cas atteinte à la diversité des programmes ou des opérateurs.

Le focus jurisprudentiel

S’il est vrai que, par une décision en date du 8 juillet 2008 portant sur un différend similaire qui opposait le groupe AB SAT à la chaîne M6, le CSA avait enjoint cette dernière de faire une proposition commerciale objective et non discriminatoire au distributeur, le Conseil d’Etat saisi d’un recours pour excès de pouvoir avait fait primer la liberté contractuelle et annulé la décision de règlement de différend (CE, 7 décembre 2011, n° 321349).

Par sa décision du 22 mai 2012, le CSA s’est conformé à cette jurisprudence.


Tags:
CSA, règlement de différend, liberté contractuelle, éditeur, distributeur, Equidia, Parabole Réunion.

Fichiers: Decision_du_22_mai_2012_relative_a_un_reglement_de_differend_opposant_les_societes_Parabole_Reunion_et_Equidia_-_03_07_12.pdf